dimanche 3 mai 2015

P.2015.04.21.Note de lecture d'Exils de mon exil par Sabine Huyn, dans Terre à ciel - avril 2015.

Dans la rubrique
une note de lecture sur Exils de mon exil : 
Pour qui entretient un rapport douloureux, voire violent, avec l’exil, les textes d’Exils de mon exil de Sanda Voïca surprennent, et adoucissent pour un moment ce qui a été de l’ordre de l’arrachement, du deuil et de la solitude. Pour cette poète d’origine roumaine, les angles de l’exil peuvent être estompés par la création (cf. la citation de William Cliff, en exergue au recueil : « Mais peut-être par l’art / on peut se sauver du brouillard ? »). Quand on la lit, on a l’impression qu’elle est là en face de nous, en train de nous parler, ses yeux plantés dans les nôtres, tant ses paroles, directes, sans détours – tout en étant aussi profondes et déconcertantes que la langue qui les délivre paraît simple – lui ressemblent : pleines de délicatesse, d’esprit, de mordant, tout en donnant l’air de ne pas y toucher (« j’ai toujours manqué d’épines », dit-elle joliment, malicieusement, avant de nous planter en plein cœur son « dard en fleur »). Et malgré le fait qu’elle nous arrête en disant « Ne croyez pas qu’avec ces détails / je vous ai tout dit », on a quand même l’impression de la connaître. Mais est-ce important de connaître un auteur qu’on lit, surtout quand on a la conviction que notre intuition à son sujet correspond à la personne qu’elle est ? Et ici, l’on parle d’une âme dont les mots sont le miroir. En effet, à lire Sanda Voïca on réalise qu’elle dénude et même dissèque son âme, dans des poèmes philosophiques, abstraits, qui s’attachent peut-être à révéler quelque chose de son rapport à l’écriture – et du désir qui porte celle-ci – qui serait de l’ordre du dépaysement, mais sans désorientation, plutôt avec le soulagement qu’il la distrait (peut-être) de l’autre exil, le géographique dont j’évoquais plus haut la brutalité intrinsèque – « Et surtout, je reste en guerre permanente », précise-t-elle, avant d’ajouter dans le même poème : « Exil que j’exile dans ces lignes ».
Jamais le jour ne fut plus beau.
Même les rails montent au ciel.
Suis-je ou pas
dans le désert vertical ?
Bonheur estropiant ?
À qui l’innocence ?